Lycée Enseignement secondaire
Lieu
Océan Indien
Ile de Mayotte - Ville de Sada -(Comores)
Maîtrise d'ouvrage
Etat Français
Ministere de l'équipement
Programme
Lycée d'enseignement secondaire 800 élèves
comprenant son éxtension pour 1200 élèves
-Restauration- Pensionnat
-maisons enseignants
Fondations anti-sismique-Ventilations naturelles
Surface
12 000 m2
Calendrier
1994 - 1995 - Concours
Coût
3 500 000.€ HT
Pourquoi construire en Pierre
En 1978 Mayotte
n’échappait pas à la tentation du parpaing, sable de mer, un peu de ciment, un
moule suffisent.
Alors pourquoi
construire en pierre, pourquoi s’embêter à casser des cailloux, pourquoi les
empiler laborieusement ?
i Il y à une réponse
écologique à cela : parce que c’est la pierre du lieu et qu’il faut
valoriser les ressources locales.
Cette réponse cohérente, raisonnable, pourrait être développée. Elle soulignerait la justesse d’une politique alternative sur les matériaux locaux, l’intelligence et la
rigueur des hommes qui l’ont mise en œuvre.
Je propose ici une
autre explication, plus fondamentale, celle du plaisir créatif au niveau du maçon, au niveau de l’architecte, plaisir de la main, du muscle, de l’intelligence
et de la vibration sensible.
Plaisir élitiste de ceux qui jouissent…En face,
aigres, ceux quisubissent parce que c’est dur, incompréhensible, contraignant,impossible.
Le plaisir, la
jouissance deconstruire, lorsqu’ils rayonnent,génèrent un espace de frustration qui coagule dans le même étiage rachitique, maîtres d’ouvrage, architectes, marchands de travaux, incapable de foutre créatif.
Notre jolie pierre
noire maintient son cap, malgré l’acharnement des ingénieurs, des « architectes »
de carton pâte, l’absence de carrières officielles.
Des centaines d’ouvriers
s’envoient en l’air dans le martèlement de la phonolithe, dans l’ordonnance des
opus, dans les mosaïques des bombes volcaniques.
Mais la pierre pourrait n’en avoir plus pour longtemps, la douce chorale des frustrés rêve de
blanc.
La leucoplasie domienne s’épand sur nos villages. Là-bas, sous sa palme, le tailleur de pierre syncope le «La» d’une somnolence de
basalte.
Il sait qu’il y a mille chemins au plaisir.
En ce temps là…
En ces temps là, me dit en chevrotant l’architecte, il fallait tout faire, d’autant plus que mal formés, nous ne savions rien. Il fallait construire sa table à dessin, commander des outils, creuser des fondations à la pelle et à la pioche, scier, clouer, tracer, commander, organiser, lever les charpentes, maçonner des pierres…
En ce temps là, conclut le vieux gâteux, être architecte ce n’était pas le nœud pap, et la manucure…Et puis il y avait l’eau…Elle était imbuvable, l’eau. Ceux qui essayaient mouraient au bout de quelques verres. Il restait le whisky, le rhum, le gin, c’est ce qu’il y a de mieux pendant les dix premières années.
Après les dents tombent, les mains tremblent, les nuits sont invariablement sans lune.
Il faut alors des compagnes jeunes, m’affirma en confidence le vieux cochon.
En ce temps là, être architecte on n’y pensait pas, on se coltinait de la glaise, du bois, des briques, dans les vapeurs de jus de mangue et de sueur mâle.
On buvait et on baisait…Une île ou on échappe pas au rut.
…Alors il y avait de beaux murs.
Confidences - Aôut 1995 - Attyla Cheyssial...Architecte